Convention 66 : vers une revalorisation de la grille des salaires ?

Un chiffre qui refuse de bouger, année après année : le coefficient d’entrée de la convention 66 reste obstinément collé au salaire minimum légal. Un paradoxe pour des professionnels dont l’expérience et les diplômes dépassent souvent ce seuil, mais qui voient leurs fiches de paie stagner. Même les dernières revalorisations du point d’indice n’ont pas effacé ce décalage. Résultat, une fracture persistante pour toute une filière, qui attendait beaucoup d’un changement… qui tarde à venir.
Pour l’année 2025, les choses pourraient enfin bouger. Une revalorisation de la valeur du point se profile, accompagnée de discussions sur un remodelage complet des grilles. Au cœur des négociations : la reconnaissance des compétences, l’ajustement aux réalités économiques, et un constat partagé par les acteurs du secteur : rester à l’arrêt n’est plus une option.
Plan de l'article
Depuis 1966, la convention 66 façonne la vie au travail de milliers de salariés œuvrant dans le secteur médico-social. Ce texte encadre les conditions d’emploi et de rémunération dans les établissements et services accueillant des personnes en situation de handicap ou en difficulté d’adaptation. Année après année, la convention s’est imposée comme le socle des métiers du sanitaire, social et médico-social.
Mais aujourd’hui, la donne a changé. Vieillissement de la population, complexité des situations accompagnées, attentes plus fortes des familles : la convention de travail nationale se retrouve à devoir absorber de nouvelles pressions. Les structures, qu’elles soient associatives ou rattachées au secteur public, doivent composer avec des moyens sous contrainte. Recruter, fidéliser, motiver : le quotidien des ressources humaines n’a jamais été aussi tendu, à Paris comme en région.
Au cœur du système, la grille salariale de la ccn 66 : elle définit les évolutions de carrière, fixe les règles pour l’attribution des primes et balise la reconnaissance des missions. Lors de la dernière table ronde réunissant syndicats, employeurs et représentants du secteur, plusieurs points ont été mis en avant :
- Des difficultés croissantes pour recruter et stabiliser les équipes ;
- Un fossé qui se creuse entre salaires conventionnels et minimum légal (SMIC) ;
- Une demande forte de revalorisation pour maintenir l’attractivité du secteur médico-social.
La convention nationale CCN se trouve donc à un moment charnière. Rester figée, c’est risquer de perdre sa capacité à soutenir le travail en établissements et services et à garantir la qualité de l’accompagnement.
Comment fonctionne la grille des salaires et pourquoi la valeur du point est déterminante
Le calcul de la rémunération dans la convention 66 s’appuie sur un principe clair : salaire brut = coefficient x valeur du point. Le coefficient tient compte du poste occupé, du niveau de diplôme et de l’ancienneté. Il place chaque professionnel, éducateur spécialisé, maîtresse de maison, agent de service, sur l’échelle salariale adaptée à son parcours.
La valeur du point agit comme le baromètre du secteur. Un simple ajustement a un effet immédiat sur toutes les paies. Pourtant, depuis plusieurs années, l’augmentation du SMIC a largement dépassé la hausse de cette valeur conventionnelle. Conséquence : certains salaires de la grille tombent sous le minimum légal. Une situation qui sape le principe d’équité, pourtant au cœur de la convention 66.
Dans ce contexte, les primes, ancienneté, sujétion, prennent une place accrue. Elles viennent compléter le salaire, mais ne peuvent masquer la réalité : le véritable enjeu, c’est une grille réajustée pour coller au marché du travail et aux exigences de la filière médico-sociale. Partout, la tension monte. À Paris comme en province, la question de la revalorisation du point reste brûlante. Sans changement, la convention risque d’y laisser son âme.
Revalorisation en 2025 : ce qui va changer pour les professionnels concernés
2025 pourrait marquer un tournant pour les salariés relevant de la convention 66. Après une longue attente, la grille des salaires fait enfin l’objet d’une révision concrète. Les établissements et services pour personnes en situation de handicap, mais aussi ceux du secteur social, s’apprêtent à voir leur système de rémunération évoluer. Au centre : la hausse de la valeur du point, qui impactera immédiatement le salaire brut de chaque salarié encadré par la CCN.
Autre avancée : la volonté, partagée par les syndicats et Nexem, la fédération majeure des employeurs,, d’intégrer la prime Ségur au salaire de base. Jusqu’ici à part, ce complément devrait être fondu dans la rémunération indiciaire, afin de renforcer l’attractivité du secteur et de répondre à la pression des embauches dans le secteur public.
Les points clés de la réforme
Voici les principaux volets de la réforme attendue :
- Augmentation de la valeur du point, répercutée sur toute la grille salariale ;
- Intégration de la prime Ségur du secteur sanitaire et social au salaire brut ;
- Réajustement des plus petits coefficients, ceux dont le salaire flirtait jusqu’ici avec le SMIC.
Concrètement, les éducateurs spécialisés, moniteurs, agents de service verront leur rémunération évoluer. Si cette avancée était attendue, elle ne règle pas tout : la reconnaissance des métiers et la fidélisation des équipes restent des chantiers ouverts, dans la capitale comme en région. Cette revalorisation donne un nouveau souffle, mais la bataille pour l’attractivité et l’amélioration des conditions de travail ne fait que commencer.
Quels enjeux pour l’avenir des métiers sous convention 66 ?
La refonte de la grille des salaires suscite de fortes attentes dans le secteur médico-social. Les professionnels soumis à la convention 66 se retrouvent à la croisée des chemins, face à des défis renouvelés. L’attractivité de ces métiers est clairement en jeu. Entre la concurrence du secteur public et un secteur privé qui accélère, les établissements doivent désormais offrir des parcours professionnels structurés, avec de vraies perspectives d’évolution.
Le nouveau barème salarial vise à réduire la pression sur les rémunérations proches du salaire minimum. Pourtant, la fidélisation reste une question centrale : comment inciter éducateurs spécialisés, moniteurs, agents administratifs à rester, quand le marché peine à satisfaire la demande ? Pour les syndicats, la reconnaissance passe aussi par la revalorisation des primes et indemnités, mais aussi par une adaptation concrète des conditions de travail.
Plusieurs pistes se dessinent pour renforcer l’avenir du secteur :
- Réaménager la grille salariale afin de réduire les écarts avec le SMIC et renforcer la cohésion interne ;
- Développer une politique RH ambitieuse, misant sur la formation continue et la mobilité ;
- Rendre les métiers du secteur sanitaire social plus attractifs, pour garantir la relève et répondre aux besoins croissants.
La négociation entre employeurs, Nexem et syndicats s’apparente désormais à une course de fond, où chaque arbitrage pèsera sur la capacité à maintenir la qualité de l’accompagnement et à offrir des perspectives solides aux salariés. La convention nationale demeure le point d’équilibre, entre reconnaissance professionnelle et viabilité économique. Reste à savoir si les prochaines années tiendront cette promesse, ou s’il faudra, encore, inventer de nouveaux repères.